Mascarades

Performance spectacle entre chien et loup pour adultes en mal d’enfance
Entre accessoires et prothèses langagières : pastiches et postiches du – mauvais – théâtre de la vie

Conception à partir d’écritures de plateau et d’observations assidues du réel
Mise en scène et scénographie de Sophie Hutin

> Résumé

« Si j’étais toi… », »Je dis ça je ne dis rien », « Il faudrait qu’on se voie pour en parler », « Honnêtement », « Pardon mais… », « Putain de merde », « Le chien et les femmes sont soumis »…

Autant d’expressions du langage ordinaire, de tournures, d’adverbes, de connecteurs logiques, voire de règles de grammaire appris‧e‧s par conditionnement au moment de l’enfance, impensé‧e‧s car jamais interrogé‧e‧s dans leur oralité, et qui racontent des rapports de domination en train de se tisser, voire des jugements discriminants cristallisés, tapis au plus profond de soi. Des masques de mots, des petites aliénations anodines, des prothèses portées par imitation, puis oubliées au fil des ans et qui nous séparent d’un rapport sensible à l’inconnu.

Le terreau de travail est né d’observations de nos pratiques langagières au quotidien transposées ou retraduites au travers d’improvisations sur le plateau, donnant ainsi naissance à des protocoles de jeu s’actualisant différemment à chaque représentation dans un Oulipo corporel.

Le spectacle est destiné aux adultes comme aux collégien‧ne‧s et lycéen‧ne‧s en réflexion sur les rapports de domination et de discrimination sédimentés dans et par le langage.

> Intention

Quelles stratégies « la société » déploie-t-elle pour parler à travers nous ? Il s’agit de nous prendre en flagrant délit de pensée de masse, de nous capturer nous-mêmes dans le filet de la norme, de montrer à quel point ça pense malgré nous, même -surtout ?- quand nous croyons maîtriser notre langage. La grammaire est une toile d’araignée et notre liberté n’y est au mieux que celle du prédateur et, d’ailleurs, sans doute y est-elle exclusivement celle du moucheron. Impossible de penser un ailleurs, ou même simplement d’envisager son existence.  Au demeurant, peut-être le bégaiement est-il un indice de bonne santé, le signe de notre liberté qui cherche à se frayer un chemin à travers les rets du langage.

Notre spectacle interrogera notre (in)capacité de déconditionnement, par la voix ou par le corps, nos silences sidérés, nos balbutiements comme signes fragiles d’une voix (d’une voie ?) en recherche d’elle-même. Ce spectacle sera militant. Il sera visuel et sonore avant d’être parlé. Il s’adressera d’abord à notre ventre plutôt qu’à notre tête afin de nous détourner de la normopathie ordinaire du langage.

Notre petite enquête ethnolinguistique consiste à adopter un point de -presque- scientifique, -presque- tendre, sur la norme ou le rapport de domination en train de s’écrire. Le terreau de travail est né d’observations de nos pratiques langagières au quotidien transposées ou retraduites au travers d’improvisations sur le plateau, donnant ainsi naissance à des protocoles de jeu s’actualisant différemment à chaque représentation dans un Oulipo corporel.

Sophie Hutin

> Extrait

Ou comment se-parler-de-tout-de-rien ou quand une compilation aléatoire de phrases « toutes faites » paraît produire une conversation.

« Toi 1 – Ne le prends pas mal… Ce n’est pas pour dire mais…
Toi 2 – Ça ne me pose aucun problème.
Toi 1 – Je ne veux pas te blesser. Ne te fâche pas.
Toi 2 – Excuse-moi je te coupe. Ça ne doit pas être facile.
Toi 1 – Je ne peux pas aller plus vite que la musique.
Toi 2 – Je suis sûr que tu vas y arriver. On ne va quand même pas tout faire à ta place.
Toi 1 – Je ne vois pas du tout de quoi tu parles. Si tout le monde faisait comme toi…
Toi 2 – je dis ça, je dis rien. J’ai tout dit, j’ai rien dit.
Toi 1 – Il faudrait qu’on se voie pour en parler.
Toi 2 – Tu n’es pas sérieuse?
Toi 1 – Ça me met hors de moi.
Toi 2 – Si ce n’est pas malheureux quand même ! Vraiment, sérieusement, franchement, honnêtement !
Toi 1 – Ça ne devrait pas se passer comme ça. On n’est pas obligés.
Toi 2 – Il faudrait faire quelque chose. Y’a qu’à… t’as qu’à… on n’a qu’à…
Toi 1 – C’est quoi qui te dérange ? Moi, je vais te dire ce qui te dérange.
Toi 2 – Je ne t’entends pas.
Toi 1 – Il faudrait qu’on se voie pour en parler. »

> Partenaires

Le projet a bénéficié de la mise à disposition de studio au CND Centre national de la danse, du soutien du Centre Bertin Poirée, du Centre d’animation Ken Saro-Wiwa, de la Parole Errante Demain et du Réseau des Arts vivants en Île-de-France (RAViV) dans le cadre des Laboratoires participatifs et solidaires. Il a fait l’objet d’une campagne de financement participatif <3

> Premières

Création les 19 & 20 janvier 2018 à la Parole errante à Montreuil (93) – 9, rue François Debergue – M° Croix de Chavaux (Ligne 9)
Avec : Beatriz Gallizo, Pierre Serra, Mélanie Tanneau, Nicolas Torrens
Lumières : Flore Dupont
Masques : Robin Summa
Administration de production : Agnese Serallegri
Affiche : Virginie Sala – Petit Oiseau
Conception graphique : Clémence Saunier
Diffusion : Caroline Pires